Mouvements sociaux, gouvernements progressistes et rapports à l’économie dans l’Argentine post-néolibérale (2000-2017)

Autores
Trenta, Arnaud
Año de publicación
2018
Idioma
francés
Tipo de recurso
artículo
Estado
versión publicada
Descripción
Depuis les années 2000, les sociétés latino-américaines connaissent un regain d'intérêt, à la fois scientifique et politique, en raison des mouvements sociaux et des gouvernements de gauche qui occupent le centre de l'arène politique et expérimentent des alternatives au néolibéralisme. Dans le contexte de la globalisation, rares sont les régions du monde à avoir connu des mobilisations aussi improbables que celles du mouvement des sans-terre au Brésil ou du mouvement des travailleurs au chômage en Argentine, et à avoir vu les inégalités sociales se réduire grâce à des politiques sociales hybrides (universelles et d'activation). Les processus révolutionnaires au Venezuela, en Équateur et en Bolivie, adossés à de nouvelles Constitutions et portés par des groupes sociaux historiquement marginalisés, offrent également de nouveaux enseignements sur les conditions de dépassement du capitalisme et du nationalisme eurocentré. Il n'est pas étonnant alors de remarquer la percée de certains théoriciens du Sud comme Ernesto Laclau et Boaventura de Sousa Santos dans les débats académiques du Nord, phénomène peu entrevu depuis les années 1960 et la théorie de la dépendance, ainsi que l'intensification des dialogues Nord-Sud sur les questions du politique et de l'émancipation.L'intérêt pour ces expériences, ces débats et ces théories ne doit toutefois pas occulter la réflexion critique qui permet de prendre la pleine mesure des enjeux sociaux, économiques et politiques soulevés par les situations latino-américaines. Trois ouvrages publiés ces deux dernières années permettent justement d'interroger certaines catégories d'analyse devenues trop normatives, en mettant au jour les nuances et les ambiguïtés qui entourent les phénomènes de politisation des classes populaires ou d'autogestion des travailleurs, et de réfléchir sur les limites de ces tentatives de transformation sociale et de rupture avec le néolibéralisme. Ainsi, la recherche de Julieta Quirós sur les raisons de l'engagement militant des classes populaires critique autant la perspective utilitariste et misérabiliste du « clientélisme » nourri par l'assistancialisme, que la vision spontanéiste et idéalisée de la « résistance » populaire à la gouvernance néolibérale. L'ouvrage collectif dirigé par María Inés Fernández Álvarez éclaire, pour sa part, les contradictions des expériences autogestionnaires des travailleurs populaires, et critique l'usage de prénotions homogénéisantes et normatives telles que l'horizontalité et la réciprocité des relations sociales dans les entreprises récupérées et les coopératives. Le livre de Maristella Svampa propose, enfin, une réflexion critique de l'action politique et économique des gouvernements progressistes latino-américains, du point de vue de la cause environnementale et des relations entre les différentes tendances de la gauche. Les trois auteures choisies pour cette lecture croisée sont des spécialistes des mouvements sociaux et de l'action collective en Argentine, même si les travaux récents de l'une d'entre elles, Maristella Svampa, portent sur la question du développement dans l'ensemble du continent. La société argentine constitue une bonne entrée pour analyser les reconfigurations du politique et de l'économie au cours du cycle progressiste latino-américain, ce pays ayant été le bon élève du FMI et de la Banque mondiale durant les années 1990 avant de participer activement à la construction régionale d'une nouvelle hégémonie des gouvernements de gauche à partir des années 2000. Le cas de l'Argentine éclaire également les conséquences ambivalentes de la hausse spectaculaire du prix des matières premières sur le marché mondial (soja, céréales, métaux, hydrocarbures) sur la relance de l'activité économique en Amérique latine. D'une part, l'exploitation et l'exportation des matières premières constituent le moteur d'une croissance élevée et durable (7,5 % de moyenne de 2003 à 2011 pour l'Argentine) qui génère les rentrées fiscales nécessaires à un redéploiement de l'intervention étatique dans les dimensions économique et sociale. D'autre part, les ravages environnementaux causés par le modèle extractiviste-exportateur ternissent l'action des différents gouvernements progressistes, la plupart d'entre eux ayant ouvert des marchés aux entreprises transnationales et réprimé les mobilisations en faveur de la protection des ressources naturelles . Pour nourrir cette réflexion critique sur les différentes expériences de changement social en Argentine et, plus largement, en Amérique latine, nous proposons une lecture croisée de ces ouvrages en trois temps. La recherche de Julieta Quirós permet d'abord de questionner le rapport au politique des classes populaires, durant les premières années du cycle progressiste encore marquées par la période insurrectionnelle et l'effervescence des mouvements sociaux. Les articles compilés par María Inés Fernández Álvarez viennent ensuite creuser l'analyse des expériences de démocratie dans le travail entre les années 2000 et 2010, au niveau des organisations autogérées et de leurs relations avec les politiques de soutien à l'économie sociale. Enfin, le livre de Maristella Svampa embrasse l'ensemble de la période et offre un point de vue comparatif et distancié sur l'action des gouvernements progressistes et leurs limites à l'approfondissement de la participation politique. Nous revenons en conclusion sur les enseignements de ces recherches à la question démocratique en Amérique latine, mais aussi en Europe.
Fil: Trenta, Arnaud. Consejo Nacional de Investigaciones Científicas y Técnicas. Centro Científico Tecnológico Conicet - Mendoza. Instituto de Ciencias Humanas, Sociales y Ambientales; Argentina
Materia
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PROGRESSISME
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Il n'est pas étonnant alors de remarquer la percée de certains théoriciens du Sud comme Ernesto Laclau et Boaventura de Sousa Santos dans les débats académiques du Nord, phénomène peu entrevu depuis les années 1960 et la théorie de la dépendance, ainsi que l'intensification des dialogues Nord-Sud sur les questions du politique et de l'émancipation.L'intérêt pour ces expériences, ces débats et ces théories ne doit toutefois pas occulter la réflexion critique qui permet de prendre la pleine mesure des enjeux sociaux, économiques et politiques soulevés par les situations latino-américaines. Trois ouvrages publiés ces deux dernières années permettent justement d'interroger certaines catégories d'analyse devenues trop normatives, en mettant au jour les nuances et les ambiguïtés qui entourent les phénomènes de politisation des classes populaires ou d'autogestion des travailleurs, et de réfléchir sur les limites de ces tentatives de transformation sociale et de rupture avec le néolibéralisme. Ainsi, la recherche de Julieta Quirós sur les raisons de l'engagement militant des classes populaires critique autant la perspective utilitariste et misérabiliste du « clientélisme » nourri par l'assistancialisme, que la vision spontanéiste et idéalisée de la « résistance » populaire à la gouvernance néolibérale. 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La société argentine constitue une bonne entrée pour analyser les reconfigurations du politique et de l'économie au cours du cycle progressiste latino-américain, ce pays ayant été le bon élève du FMI et de la Banque mondiale durant les années 1990 avant de participer activement à la construction régionale d'une nouvelle hégémonie des gouvernements de gauche à partir des années 2000. Le cas de l'Argentine éclaire également les conséquences ambivalentes de la hausse spectaculaire du prix des matières premières sur le marché mondial (soja, céréales, métaux, hydrocarbures) sur la relance de l'activité économique en Amérique latine. D'une part, l'exploitation et l'exportation des matières premières constituent le moteur d'une croissance élevée et durable (7,5 % de moyenne de 2003 à 2011 pour l'Argentine) qui génère les rentrées fiscales nécessaires à un redéploiement de l'intervention étatique dans les dimensions économique et sociale. D'autre part, les ravages environnementaux causés par le modèle extractiviste-exportateur ternissent l'action des différents gouvernements progressistes, la plupart d'entre eux ayant ouvert des marchés aux entreprises transnationales et réprimé les mobilisations en faveur de la protection des ressources naturelles . Pour nourrir cette réflexion critique sur les différentes expériences de changement social en Argentine et, plus largement, en Amérique latine, nous proposons une lecture croisée de ces ouvrages en trois temps. La recherche de Julieta Quirós permet d'abord de questionner le rapport au politique des classes populaires, durant les premières années du cycle progressiste encore marquées par la période insurrectionnelle et l'effervescence des mouvements sociaux. Les articles compilés par María Inés Fernández Álvarez viennent ensuite creuser l'analyse des expériences de démocratie dans le travail entre les années 2000 et 2010, au niveau des organisations autogérées et de leurs relations avec les politiques de soutien à l'économie sociale. Enfin, le livre de Maristella Svampa embrasse l'ensemble de la période et offre un point de vue comparatif et distancié sur l'action des gouvernements progressistes et leurs limites à l'approfondissement de la participation politique. Nous revenons en conclusion sur les enseignements de ces recherches à la question démocratique en Amérique latine, mais aussi en Europe.Fil: Trenta, Arnaud. Consejo Nacional de Investigaciones Científicas y Técnicas. Centro Científico Tecnológico Conicet - Mendoza. Instituto de Ciencias Humanas, Sociales y Ambientales; ArgentinaDe Boeck Supérieur2018-04info:eu-repo/semantics/articleinfo:eu-repo/semantics/publishedVersionhttp://purl.org/coar/resource_type/c_6501info:ar-repo/semantics/articuloapplication/pdfapplication/pdfhttp://hdl.handle.net/11336/93637Trenta, Arnaud; Mouvements sociaux, gouvernements progressistes et rapports à l’économie dans l’Argentine post-néolibérale (2000-2017); De Boeck Supérieur; Participations. Revue de sciences sociales sur la démocratie et la citoyenneté; 20; 1; 4-2018; 201-2162034-7650CONICET DigitalCONICETfrainfo:eu-repo/semantics/altIdentifier/url/https://www.cairn.info/revue-participations-2018-1-page-201.htminfo:eu-repo/semantics/altIdentifier/doi/10.3917/parti.020.0199info:eu-repo/semantics/openAccesshttps://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/2.5/ar/reponame:CONICET Digital (CONICET)instname:Consejo Nacional de Investigaciones Científicas y Técnicas2025-09-03T09:52:37Zoai:ri.conicet.gov.ar:11336/93637instacron:CONICETInstitucionalhttp://ri.conicet.gov.ar/Organismo científico-tecnológicoNo correspondehttp://ri.conicet.gov.ar/oai/requestdasensio@conicet.gov.ar; lcarlino@conicet.gov.arArgentinaNo correspondeNo correspondeNo correspondeopendoar:34982025-09-03 09:52:38.145CONICET Digital (CONICET) - Consejo Nacional de Investigaciones Científicas y Técnicasfalse
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Trois ouvrages publiés ces deux dernières années permettent justement d'interroger certaines catégories d'analyse devenues trop normatives, en mettant au jour les nuances et les ambiguïtés qui entourent les phénomènes de politisation des classes populaires ou d'autogestion des travailleurs, et de réfléchir sur les limites de ces tentatives de transformation sociale et de rupture avec le néolibéralisme. Ainsi, la recherche de Julieta Quirós sur les raisons de l'engagement militant des classes populaires critique autant la perspective utilitariste et misérabiliste du « clientélisme » nourri par l'assistancialisme, que la vision spontanéiste et idéalisée de la « résistance » populaire à la gouvernance néolibérale. L'ouvrage collectif dirigé par María Inés Fernández Álvarez éclaire, pour sa part, les contradictions des expériences autogestionnaires des travailleurs populaires, et critique l'usage de prénotions homogénéisantes et normatives telles que l'horizontalité et la réciprocité des relations sociales dans les entreprises récupérées et les coopératives. Le livre de Maristella Svampa propose, enfin, une réflexion critique de l'action politique et économique des gouvernements progressistes latino-américains, du point de vue de la cause environnementale et des relations entre les différentes tendances de la gauche. Les trois auteures choisies pour cette lecture croisée sont des spécialistes des mouvements sociaux et de l'action collective en Argentine, même si les travaux récents de l'une d'entre elles, Maristella Svampa, portent sur la question du développement dans l'ensemble du continent. La société argentine constitue une bonne entrée pour analyser les reconfigurations du politique et de l'économie au cours du cycle progressiste latino-américain, ce pays ayant été le bon élève du FMI et de la Banque mondiale durant les années 1990 avant de participer activement à la construction régionale d'une nouvelle hégémonie des gouvernements de gauche à partir des années 2000. Le cas de l'Argentine éclaire également les conséquences ambivalentes de la hausse spectaculaire du prix des matières premières sur le marché mondial (soja, céréales, métaux, hydrocarbures) sur la relance de l'activité économique en Amérique latine. D'une part, l'exploitation et l'exportation des matières premières constituent le moteur d'une croissance élevée et durable (7,5 % de moyenne de 2003 à 2011 pour l'Argentine) qui génère les rentrées fiscales nécessaires à un redéploiement de l'intervention étatique dans les dimensions économique et sociale. D'autre part, les ravages environnementaux causés par le modèle extractiviste-exportateur ternissent l'action des différents gouvernements progressistes, la plupart d'entre eux ayant ouvert des marchés aux entreprises transnationales et réprimé les mobilisations en faveur de la protection des ressources naturelles . Pour nourrir cette réflexion critique sur les différentes expériences de changement social en Argentine et, plus largement, en Amérique latine, nous proposons une lecture croisée de ces ouvrages en trois temps. La recherche de Julieta Quirós permet d'abord de questionner le rapport au politique des classes populaires, durant les premières années du cycle progressiste encore marquées par la période insurrectionnelle et l'effervescence des mouvements sociaux. Les articles compilés par María Inés Fernández Álvarez viennent ensuite creuser l'analyse des expériences de démocratie dans le travail entre les années 2000 et 2010, au niveau des organisations autogérées et de leurs relations avec les politiques de soutien à l'économie sociale. Enfin, le livre de Maristella Svampa embrasse l'ensemble de la période et offre un point de vue comparatif et distancié sur l'action des gouvernements progressistes et leurs limites à l'approfondissement de la participation politique. Nous revenons en conclusion sur les enseignements de ces recherches à la question démocratique en Amérique latine, mais aussi en Europe.
Fil: Trenta, Arnaud. Consejo Nacional de Investigaciones Científicas y Técnicas. Centro Científico Tecnológico Conicet - Mendoza. Instituto de Ciencias Humanas, Sociales y Ambientales; Argentina
description Depuis les années 2000, les sociétés latino-américaines connaissent un regain d'intérêt, à la fois scientifique et politique, en raison des mouvements sociaux et des gouvernements de gauche qui occupent le centre de l'arène politique et expérimentent des alternatives au néolibéralisme. Dans le contexte de la globalisation, rares sont les régions du monde à avoir connu des mobilisations aussi improbables que celles du mouvement des sans-terre au Brésil ou du mouvement des travailleurs au chômage en Argentine, et à avoir vu les inégalités sociales se réduire grâce à des politiques sociales hybrides (universelles et d'activation). Les processus révolutionnaires au Venezuela, en Équateur et en Bolivie, adossés à de nouvelles Constitutions et portés par des groupes sociaux historiquement marginalisés, offrent également de nouveaux enseignements sur les conditions de dépassement du capitalisme et du nationalisme eurocentré. Il n'est pas étonnant alors de remarquer la percée de certains théoriciens du Sud comme Ernesto Laclau et Boaventura de Sousa Santos dans les débats académiques du Nord, phénomène peu entrevu depuis les années 1960 et la théorie de la dépendance, ainsi que l'intensification des dialogues Nord-Sud sur les questions du politique et de l'émancipation.L'intérêt pour ces expériences, ces débats et ces théories ne doit toutefois pas occulter la réflexion critique qui permet de prendre la pleine mesure des enjeux sociaux, économiques et politiques soulevés par les situations latino-américaines. 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L'ouvrage collectif dirigé par María Inés Fernández Álvarez éclaire, pour sa part, les contradictions des expériences autogestionnaires des travailleurs populaires, et critique l'usage de prénotions homogénéisantes et normatives telles que l'horizontalité et la réciprocité des relations sociales dans les entreprises récupérées et les coopératives. Le livre de Maristella Svampa propose, enfin, une réflexion critique de l'action politique et économique des gouvernements progressistes latino-américains, du point de vue de la cause environnementale et des relations entre les différentes tendances de la gauche. Les trois auteures choisies pour cette lecture croisée sont des spécialistes des mouvements sociaux et de l'action collective en Argentine, même si les travaux récents de l'une d'entre elles, Maristella Svampa, portent sur la question du développement dans l'ensemble du continent. La société argentine constitue une bonne entrée pour analyser les reconfigurations du politique et de l'économie au cours du cycle progressiste latino-américain, ce pays ayant été le bon élève du FMI et de la Banque mondiale durant les années 1990 avant de participer activement à la construction régionale d'une nouvelle hégémonie des gouvernements de gauche à partir des années 2000. Le cas de l'Argentine éclaire également les conséquences ambivalentes de la hausse spectaculaire du prix des matières premières sur le marché mondial (soja, céréales, métaux, hydrocarbures) sur la relance de l'activité économique en Amérique latine. D'une part, l'exploitation et l'exportation des matières premières constituent le moteur d'une croissance élevée et durable (7,5 % de moyenne de 2003 à 2011 pour l'Argentine) qui génère les rentrées fiscales nécessaires à un redéploiement de l'intervention étatique dans les dimensions économique et sociale. D'autre part, les ravages environnementaux causés par le modèle extractiviste-exportateur ternissent l'action des différents gouvernements progressistes, la plupart d'entre eux ayant ouvert des marchés aux entreprises transnationales et réprimé les mobilisations en faveur de la protection des ressources naturelles . Pour nourrir cette réflexion critique sur les différentes expériences de changement social en Argentine et, plus largement, en Amérique latine, nous proposons une lecture croisée de ces ouvrages en trois temps. La recherche de Julieta Quirós permet d'abord de questionner le rapport au politique des classes populaires, durant les premières années du cycle progressiste encore marquées par la période insurrectionnelle et l'effervescence des mouvements sociaux. Les articles compilés par María Inés Fernández Álvarez viennent ensuite creuser l'analyse des expériences de démocratie dans le travail entre les années 2000 et 2010, au niveau des organisations autogérées et de leurs relations avec les politiques de soutien à l'économie sociale. Enfin, le livre de Maristella Svampa embrasse l'ensemble de la période et offre un point de vue comparatif et distancié sur l'action des gouvernements progressistes et leurs limites à l'approfondissement de la participation politique. Nous revenons en conclusion sur les enseignements de ces recherches à la question démocratique en Amérique latine, mais aussi en Europe.
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